IL ETAIT UNE FOIS... LE C.P.!
Bécancour 1975. Le petit coquet village de Bécancour devenu un secteur de la grande ville de Bécancour est plutôt animé: la construction de la Centrale Nucléaire aux limites de Gentilly et Bécancour a provoqué un afflux de travailleurs provenant de l'extérieur... pas aux goûts et attentes des citoyens locaux qui se considèrent un peu perdants, l'accès aux emplois payants étant demeuré limité. L'agriculture n'avait pas préparé les travailleurs bécancourois à des emplois industriels ou de construction.
Certains parvinrent quand même à tirer profit de la situation...
Paul Leblanc opérait un établissement hôtelier à l'intersection de la route 132 et de la rivière Bécancour. Visionnaire à la façon, Paul avait fait construire une quinzaine d'unités de motels sur ses terrains, destinés surtout aux travailleurs d'Hydro et des usines CIL et SKW en construction dans le parc industriel adjacent. Mais, ses motels ne connaissaient pas vraiment les succès escomptés.
Le complexe ''Chez Paul'' avait emprunté un raccourci: on le connaissant comme le ''CP'', tout simplement.
A cette époque, il faut savoir qu'une nouvelle forme de spectacles avait envahi les bars de tout le Québec: les spectacles de danse (pas toujours classiques) exécutés par des artistes féminines plutôt court vêtues... Toujous à l'affût des nouvelles tendances, Paul a vite adhéré à cette nouveauté. Il a aménagé une scène surélevée, dans son bar, avec atmosphère de circonstance: éclairage tout en discrétion, décor approprié avec posters suggestifs, un poteau au centre de la scène pour les artistes plus aguerries, peau d'ours au plancher, sans oublier bien sûr, deux petites salles intimes en arrière de la scène, destinées sans doute à la signature d'autographes pour les clients souhaitant rencontrer personnellement leur idole....
Ainsi, les jeudi et vendredi, à partir de 17 heures, les clients envahissaient carrément le CP; travailleurs de la construction, préposés d'usines et plein d'autres honnêtes citoyens (en toute discrétion). C'était le rendez-vous par excellence. On y a même aperçu Monsieur le Maire, le notaire, sans compter un ou deux marguilliers.
A chaque mardi, dans les pages de l'hebdo Courrier Sud, Paul annonçait les artistes à venir avec, parfois, photos... Quelques plus âgés pourraient se rappeler la sulphureuse Shéhérazade, directement d'Arabie, tout droit venue des contes des Mille et Une Nuits, sobrement vêtue de pantalons bouffants, avec poitrine affublée de deux grands fort suggestifs....
Semaine après semaine, le CP dépassait largement sa capacité légale reconnue. Le succès était en corrélation avec la qualité des artistes présentes. Formule simple: la popularité du lieu attirait les plus talentueuses (pas nécessairement volumineuses comme certains esprits vaseux pourraient le croire...) et conséquemment, les plus talentueuses attiraient toujours plus d'amateurs d'art. NDLR formule plus tard empruntée pour la saucisse HyGrade....
Ainsi, le CP est devenu un endroit mythique qui a conservé sa célébrité, 50 ans plus tard. La seule évocation du CP continue de susciter des sourires coquins, même chez des plus jeunes qui n'ont pas eu cette chance de fréquenter l'établissement.
Il est possible que le CP ait parfois eu un impact sur les ménages de l'époque... Il a probablement été une occasion d'incompréhension matrimoniale, surtout de la part des légitimes dont l'imaginaire était fortement mis à mal. Il a sans doute été l'occasion de quelques ''petits'' mensonges... Certains supposaient même que la fréquentation du CP eût pu ''sauver des ménages'', en supposant que la libido du monsieur eût été parfois supérieures à celle de madame....
Bref, le CP n'a laissé personne indifférent et il reste solidement soudé à la petite histoire de Bécancour.
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